« Vous êtes donnés à vos frères, pour le salut de tous »

Le dimanche 25 juin à 16h30 à La Castille, par l’imposition des mains et le don de l’Esprit-Saint, pour le service de l’Eglise, Mgr Dominique Rey a ordonné :

Diacres :
Philippe-Jacques de Bengy
– Louis Grégoire
– Raphaël Aussedat (diocèse d’Alger)

Prêtres :
Patrick Daniellou
– Elisée Noël Njopmo
– Jean-Michel Roussel

Voici l’homélie de Monseigneur Rey

Chers Frères et Sœurs,

Fête de la musique il y a quelques jours, fête du cinéma la semaine prochaine, Mondial de football… cette semaine a été chargée d’événements sportifs et médiatiques. Le divertissement est devenu dans notre société un art de vivre, en tout cas une vaste entreprise de spectacle médiatisée et très lucrative.

Nous sommes invités en ce jour à La Castille à vivre quelque chose de décalé, de paradoxal : 6 hommes vont se donner à Dieu pour le service de l’Eglise. Ils vont se donner librement, totalement, fidèlement par amour du Christ et à sa suite. Ils vont faire profession sous vos yeux de vous aimer et de vous servir par l’annonce de la Parole, la célébration des sacrements, l’animation de vos communautés.

Nous ne sommes pas les spectateurs passifs de leur démarche. Leur engagement sollicite en retour notre responsabilité de les accueillir, d’accueillir ces frères qui vont devenir nos pères… d’accueillir ceux qui, aussi pécheurs que nous, pourront, au nom du Seigneur recevoir la confession de nos propres péchés.

Le sacerdoce dont ils vont être revêtus touche leur être, il imprime en eux un caractère indélébile. Leur amour rime avec toujours. L’apôtre Paul parlera de « sceau ». C’était le signe ineffaçable qui marquait au fer rouge le bétail ou l’esclave afin d’indiquer à quel maître il appartenait.

Le sacerdoce qu’ils vont recevoir par l’imposition des mains touche aussi leur mode de vie, leur agir, c’est-à-dire la mission dont ils vont être investis pour devenir des collaborateurs loyaux de l’évêque, comme de bons pasteurs, prêts à donner leur vie pour leurs frères.

Dans le contexte d’une société post chrétienne, je soulignerais trois dimensions particulières de la vie et du ministère du prêtre.

Homme de l’intériorité

Il doit être l’homme de l’intériorité. Benoît XVI le rappelait dans son homélie de la messe chrismale : « Etre prêtre, cela signifie devenir l’ami de Jésus-Christ. Dieu va vivre en nous et nous en Lui. Tel est notre appel sacerdotal. Ce n’est qu’ainsi que notre action en tant que prêtre peut porter du fruit. » Il s’agit de cultiver une amitié avec le Christ. Qu’est-ce que l’ami ? C’est celui avec lequel nous faisons une œuvre commune.

Cette amitié avec le Christ s’enracine dans une intimité particulière avec l’eucharistie. C’est l’instant liturgique où le prêtre est le plus identifié au Christ. Il parle et agit alors en son nom, réalisant la présence sacramentelle du Ressuscité. C’est sous nos yeux, l’instant où Jésus, le prêtre (ne formant qu’un) se livrent radicalement pour le salut de tous.

Le Curé d’Ars disait que le « sacerdoce c’est l’amour du Cœur de Jésus » (que nous fêtons en ce jour). L’intériorité du prêtre est habitée par la contemplation du geste eucharistique par lequel, du haut de la Croix, le Cœur du Christ s’ouvre sur le monde pour l’irriguer de la divine miséricorde.

L’intériorité du prêtre est eucharistique. Mais le prêtre est appelé également à demeurer dans la Parole du Christ. Il fait sienne cette Parole. Elle doit s’incarner en sa propre existence. Sa vie doit devenir évangélique. L’Ecriture, c’est sa patrie. Sa carte routière. Il la prie chaque jour. La Parole nourrit sa foi afin de l’enseigner, enrichie de sa propre méditation. Sans cette Parole de Vie, sa propre parole ne serait qu’une simple opinion parmi tant d’autres, un discours de plus, un discours de trop.

Le prêtre est l’homme de l’intériorité parce que sa mission le renvoie sans cesse à la gratuité (l’émerveillement) d’un appel auquel il a un jour répondu et dont il ne parviendra jamais à épuiser tout le mystère. Rien d’étonnant qu’en visitant tel prêtre, fut-il très avancé en âge, vous trouviez dans la chambre telle photo usée de son ordination. Ce fut le moment fondateur de sa vocation. Tout s’explique ou plutôt tout devrait s’expliquer à partir de ce don reçu en ce jour de grâce et de bénédiction. En définitive, chaque jour de son ministère consiste à actualiser et à déployer ce qu’il a reçu au jour de son ordination.

Le prêtre est l’ami du Christ. Ami du Christ parce que le Christ l’aime particulièrement et que lui-même veut aimer le Christ sans restriction. Oui, le prêtre est homme d’intériorité, homme de l’eucharistie, de la Parole, de la prière. Si le prêtre perd le sens de l’intériorité parce qu’il ne prie plus, parce qu’il est absorbé par l’agir, par l’hégémonie de l’agenda, parce qu’il a perdu la mémoire de l’appel de Dieu, parce qu’il a perdu la mémoire qu’il est « prêtre » avant tout, et que son humanité est investie par son sacerdoce, (qu’elle ne peut s’accomplir et s’épanouir en dehors ou en parallèle de celui-ci), parce qu’il est préoccupé à l’excès de sa réussite pastorale, toujours en souci de lui-même… Bref, s’il oublie que Jésus l’a choisi pour « être avec lui » avant que de faire et agir… alors il s’écarte progressivement de sa raison d’être. Alors, il verra attristé que sa parole n’intéresse plus grand monde. Il passe à côté de pourquoi le Seigneur l’a choisi, l’a béni, l’a envoyé. « Je vous ai distingué du milieu des peuples pour que vous soyez à moi » (Lv 20, 26)

L’identité eucharistique du prêtre

Le contexte social et ecclésial dans lequel nous nous trouvons appelle aussi chaque prêtre à être clair sur son identité.

Lorsque j’appelle un candidat aux ordres sacrés à devenir diacre ou prêtre, émerge une fondamentale question : Ce jeune est-il capable de donner le Christ en engageant toute son humanité dans ce don ? Cela touche son seulement à la liberté, à l’authenticité et à la générosité du don de soi, mais aussi à la capacité de chaque ministre ordonné de ne pas être compris, reconnu, approuvé dans ce don. La possibilité d’être contredit. Autant d’objections qui pour les uns constituent, à vue humaine, des barrières infranchissables. Les combats liés au don de soi peuvent rendre agressifs, provoquer des attitudes de fuite, de dépit ou de repli sur soi.

Les paroles de Jésus à la dernière Cène et que chaque prêtre redit à sa suite nous placent au cœur de cette épreuve. « Ceci est mon Corps livré pour vous…Ceci est mon Sang versé pour vous… » C’est l’heure où Jésus entre en sa Passion : Pierre va le renier, sa mission prend l’allure d’un échec, les disciples vont l’abandonner, la mort se profile à l’horizon… A la Cène, Jésus fait alors don de son Corps et de son Sang. Jésus fait de son ultime combat, une Pâque, un passage, l’occasion d’un don de soi.

La tentation existe en chaque vie chrétienne et pour chaque prêtre, d’oublier, d’oblitérer, de contourner la Cène ou la Croix, de rechercher une autre issue, un autre chemin, une autre fécondité que celle que propose le Christ : une vie livrée, un corps donné, le sang versé. Comme les disciples scandalisés de ce que Jésus annonçait sa fin prochaine, comme Pierre qui voulait sauver son Maître de la mort… nous sommes tentés de vouloir nous sauver ou sauver nos frères autrement que par le chemin de Pâques. Chaque eucharistie que nous célébrons, que vous célèbrerez, chers frères, vous ramènera toujours à cette unique réponse que le Christ a formulée face à la souffrance humaine, et parfois face à votre propre détresse, face au mystère du mal « Il n’est pas de plus grand amour que donner sa vie pour ceux qu’on aime ».

Le prêtre est ordonné pour une communauté

Permettez-moi enfin, de souligner une dimension décisive du don du sacerdoce. J’ai parlé de l’intériorité du prêtre, ami du Christ. J’ai évoqué l’identité eucharistique du prêtre, prédisposé au don de soi. Je ne veux pas oublier que le prêtre est ordonné pour une communauté. Le sacerdoce ministériel est au service du sacerdoce baptismal des fidèles. Chaque messe, qui est un repas fraternel, le rappelle : « voici mon Corps livré pour vous ». Le prêtre fait sienne cette destination sacrificielle. Son ministère ne se justifie que pour la croissance d’un corps : ce corps, c’est la communauté qui lui est confiée et à la tête de laquelle l’évêque l’a placé. Ce souci de l’édification d’autrui est le lot de sa paternité, constitue le sacrifice de sa propre vie. Ce souci prime sur tout le reste. Chaque père ou mère de famille pourrait le dire à propos de ses enfants. Si le prêtre a renoncé à fonder une famille, c’est parce que désormais, sa famille, c’est vous ! Vous êtes sa joie, sa consolation mais aussi sa peine, son labeur, sa fidélité !

Les Evangiles soulignent une délicate tension qui s’inscrit en filigrane de tout ministère sacerdotal. Le prêtre doit assumer une tension que portent les paroles consécratoires. Le Corps du Christ est livré « pour vous ». Le Sang du Christ est versé « pour vous et pour la multitude ».

Dans l’Evangile de Marc, Jésus ajoute : « En vérité, je vous le dis, je ne boirai plus du produit de la vigne jusqu’au jour où je boirai le vin nouveau dans le Royaume de Dieu » (Mc 14)

Chaque eucharistie anticipe le festin des noces de l’Agneau, qu’évoque le livre de l’Apocalypse lorsque le Seigneur soupe avec nous et nous avec lui. (Apo 3, 20)


Le prêtre est l’homme de la communauté qui se rassemble autour du repas pascal. C’est là qu’elle trouve son identité. C’est là sa source. C’est là son centre. C’est là que le corps eucharistique engendre le corps ecclésial.

En même temps, le ministère du prêtre est mobilisé entièrement par l’avènement du Royaume « pour la multitude », par la venue glorieuse du Maître, qu’anticipe chaque messe. Chaque célébration mesure la distance entre ceux quelle rassemble et ceux qui manquent à l’appel. Entre ceux qui ont part à la Table de la Parole et à la Table de l’Eucharistie, et d’autre part, ceux qui la désertent. L’intercession, la prière, les efforts du prêtre consistent à rassembler et à mobiliser sa communauté dans cette posture missionnaire, afin qu’elle puisse non seulement se définir à partir du Christ présent au milieu d’elle, mais également dans l’attente du Seigneur qui vient nous sauver. Les signes de son avènement travaillent notre monde « à la manière d’un ferment » (Concile Vatican II) Le prêtre est aussi l’homme des germinations profondes de la grâce.

Chaque eucharistie rappelle ainsi à l’Eglise (et au prêtre en particulier) que l’horizon de la communauté chrétienne, c’est la catholicité : c’est-à-dire la plénitude et l’universalité du Christ. Le Christ tout en tous : tout le message de l’Evangile destiné à tous les hommes, le Corps du Christ tout entier qui récapitule l’histoire de l’humanité, la charité du Christ rayonnant à partir des disciples et qui embrasse toutes les situations d’humanité et qui se dilate à l’égard de chacun.

Chers frères, amis du Christ, donnés à vos frères, pour le salut de tous. Telle est l’architecture de votre vocation. Une vocation qui, tout à la fois, vous saisit et vous dépasse. Comme pour tout sacrement reçu en Eglise : tout vous est donné et tout restera à faire, avec la grâce de Dieu et le soutien de ceux et celles vers lesquels l’Eglise vous envoie.

+ Dominique Rey

Publié le 21.06.2006.

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