Marie, chemin vers Dieu et Son Eglise

« Nous nous retrouvons en ce jour et en ce saint lieu de Notre-Dame du Laus pour célébrer le 4ème anniversaire de la reconnaissance des apparitions dont a bénéficié Benoîte Rencurel.
Comme tant d’autres sanctuaires mariaux, Notre Dame du Laus reçoit la visite de milliers de pèlerins, dont nous faisons aujourd’hui partie. Que venons-nous chercher dans ce lieu dédié à la prière ? Pourquoi, dans un monde sécularisé et sceptique, face aux choses surnaturelles, le message de la Vierge parle-t-il encore si profondément au cœur des hommes et des femmes de notre temps ? Pour quels motifs ces sanctuaires deviennent-ils des lieux de conversion, de réveil intérieur et de changement de vie ?
Qu’est-ce que Marie dit de manière unique, pertinente, incisive à nos contemporains pour les faire accéder au monde de Dieu ?

Marie nous donne le sens de l’intériorité

La première porte que Marie ouvre, c’est celle de l’intériorité. Dans l’Evangile, la Vierge parle si peu. Elle n’est guère bavarde ou prolixe. Et si elle ouvre la bouche, c’est pour reprendre à son compte les paroles de l’Ecriture dans son Magnificat ou investir quelques mots en lesquels se concentre sa foi
« Je suis la servante du Seigneur »
« Que tout se passe selon sa parole »
« Ton père et moi te cherchions »
« Faites tout ce qu’il vous dira ! »


L’intériorité de Marie est faite du silence par lequel elle accueille humblement en son Fils, le Verbe, la Parole de Dieu. Ce silence est la patrie de son obéissance, de son adhésion aux desseins obscurs du Seigneur. Il est l’espace caché de sa prière, de son offrande et de sa paix, l’écrin de son action, l’intimité de sa présence à Jésus, le puits en lequel elle puise la Parole de Dieu.

Ce silence de Marie écarte les bruits du monde. Ce silence de Marie protège celui de son enfant. Il est le garant de sa vie cachée en Dieu, en son sein, de sa vie cachée à Nazareth auprès de Joseph. Et Jésus est enveloppé dans ce silence de Marie. Il s’y enfonce, comme plus tard notera St Luc, « il se retirera dans les endroits déserts pour prier.~»

Ce silence de Marie porte aussi des stigmates. Marie ne dit rien au Golgotha. Son consentement à l’œuvre de Dieu est muet. Les combats et arrachements auxquels la foi trouve en ce « oui » absolu et silencieux de Marie un « point aveugle », indépassable. Ce silence est habité par la Parole de Dieu qui retentit en lui, car la Vierge ne cesse de « retenir dans son cœur », de méditer cette Parole qui s’incarne en elle.

Peut-être faut-il comprendre que le parfum de rose que certains hument en ce lieu, caractérise cette intériorité que Marie nous invite à réinvestir. Car nous vivons dans un monde bavard, superficiel. Le monde des médias, des images laisse peu de place au recueillement. Le flot de paroles qui se déverse à chaque seconde nous prive de la Parole, celle que Dieu prononce de toute éternité en son Fils unique, et que la Vierge accueille sans réserve et sans restriction.

On questionnait un jour Thérèse de Lisieux sur sa prière. « Que dites-vous à Jésus ? » Et elle, de répondre : « Je ne lui dis rien. Je l’aime » .

Un proverbe touareg nous conseille de façon avisée de faire de même~: « Si le mot que tu vas prononcer n’est pas plus grand que le silence que tu vas quitter, alors tais-toi ! »

A Notre Dame du Laus, Benoîte nous apprend que le silence est parole, le lieu du cœur à cœur. Cette humble voyante atteste de ce que la Parole de Dieu peut faire dans un être disposé par le silence à l’accueillir totalement. « Donne-moi Seigneur, un cœur qui écoute », suppliait le roi Salomon. Les dernières paroles de Benoîte avant de mourir évoquaient son « oui » intérieur : « Mes oreilles ont tant écouté~», lâchait-elle dans un ultime soupir.

Marie nous enseigne le sens du temps


La Vierge Marie nous enseigne le sens de l’intériorité, mais aussi le sens du temps, la manière chrétienne d’habiter le temps. Notre siècle vit dans l’urgence, la recherche frénétique de l’immédiateté, c’est la loi du zapping ou du clip ; du tout, tout de suite, de la satisfaction immédiate du désir, de l’hégémonie de l’instant. « Je n’ai pas le temps~» est un leitmotiv répété à l’envi par des gens tellement pressés. On veut supprimer les files d’attente, raccourcir la durée.

A ce monde qui confond l’urgent et l’important, Marie nous invite à devenir l’ami du temps. Elle vit au rythme de la grâce de Dieu et de sa providence. Elle suit Jésus. Elle respecte le rythme de Dieu. Dieu l’a élue dès le commencement du monde, et le livre de l’Apocalypse la trouve au terme de l’histoire du salut. Le temps de Marie est celui de la fidélité de Dieu.

Marie n’est pourtant pas indolente. On la trouve tout empressée sur les collines de Judée aux jours de la Visitation. Sa hâte s’inscrit dans la patience ardente de Dieu de manifester depuis les origines son salut aux hommes.
Oui, Marie nous enseigne que le temps de Dieu n’est pas le nôtre, que le temps du chrétien est à la fois mémoire (elle retenait toute chose en son cœur) et promesse (jusqu’en son Assomption, elle partage déjà la gloire de son Fils). Le temps chrétien, c’est se saisir du passé pour construire l’avenir, en vivant pleinement l’instant présent. « Celui qui a l’instant présent, a Dieu », disait Thérèse d’Avila.

Afin de nous libérer de la fièvre de l’activisme, la Vierge nous éduque à vivre au fil de la grâce ; à recevoir de jour en jour, de messe en messe, de prière en prière, dans le goutte à goutte de chaque moment, la vie comme un cadeau de Dieu, sans fuir vers l’avenir imaginé, sans se réfugier dans la nostalgie du passé révolu et idéalisé.

Marie nous enseigne la fragilité

Pédagogie du temps, mais aussi pédagogie de la fragilité ; Marie a quelque chose à dire à notre monde préoccupé (voire angoissé) par la recherche de la réussite. A Bethléem, elle tient dans ses bras l’enfant-Dieu qui se blottit en elle. Un Dieu si grand qui se fait si petit, si démuni, si dépendant ; un être absolument livré à sa sollicitude maternelle. Et au terme de la vie de Jésus, au Golgotha, Marie contemple la défiguration de son Fils livré à la vindicte populaire et aux crachats.

Benoîte Rencurel éprouvera en sa chair (je pense à ses stigmates, à ses transports intérieurs qui l’associent à la Passion du Christ), le mystère du Vendredi saint. « Ma fille, je me fais voir dans cet état, afin que tu participes aux douleurs de ma passion », lui dira le Christ en 1673. Elle comprendra peu à peu que Jésus n’est jamais autant Dieu, que dans le geste par lequel Il se donne en son humanité jusqu’à la perte de soi.
Oui, c’est dans les douleurs de l’enfantement qu’advient le Royaume de Dieu. La fécondité chrétienne est sacrificielle.


Nous vivons dans un monde de productivité, d’efficacité et de quête obsédante du succès. La recherche de la performance et de l’excellence nous fait oublier que le chemin que Dieu emprunte est celui de la petitesse (Celui qui ne redevient pas comme un petit enfant, ne peut entrer dans le Royaume). Le chemin que le Seigneur privilégie est celui de la Croix.
Non qu’il faille récuser l’effort, refuser la compétence, mais que l’un et l’autre ne fassent pas ombre à la prévenance de Dieu qui précède et porte toutes nos initiatives.

Non qu’il faille rechercher la souffrance, mais quand elle surgit, savoir l’habiter de confiance, de prière, car le Seigneur nous appelle en elle à compléter en notre chair ce qui manque à sa Passion. « Priez comme si tout dépendait de Dieu. Travaillez comme si tout dépendait de vous~», conseillait Ignace de Loyola. Marie est la parfaite illustration de cette conjugaison. Elle faisait tout pour Dieu, en sachant qu’Il faisait tout pour elle.
Nos pauvres prières, nos actions inachevées, nos épreuves, nos échecs et nos insuccès… Le Seigneur se sert de toutes nos vulnérabilités et du non-sens de nos vies, de nos infirmités, de nos débilités (voire même de nos péchés pardonnés) pour faire une œuvre qui nous excède, une œuvre qui n’est pas à la mesure de nos capacités, mais à la démesure de sa miséricorde. Dans la conscience de son indignité, Marie le sait plus que tout autre. « Le Seigneur s’est penché sur son humble servante ». Marie le sait, et ici elle nous apprend l’espérance, la possible conversion du pécheur.

Marie nous montre le chemin de l’Eglise

Marie ouvre le chemin du Christ, mais elle nous ouvre aussi la porte de l’Eglise. Je suis frappé aussi bien à Lourdes, qu’à la Salette, qu’ici à Notre Dame du Laus, que le message de la Vierge est d’inviter la voyante à faire ériger une chapelle, ou un oratoire, à construire une église.

Si Marie a été au point de départ de la conception de Jésus sous l’action de l’Esprit-Saint, elle a été aussi aux premières loges de la naissance de l’Eglise au Cénacle. Depuis la plus lointaine tradition spirituelle, Marie est associée au mystère de l’Eglise. Elle en est la figure emblématique et prophétique. Ce qui est dit de Marie, vaut pour l’Eglise. Toutes deux portent Jésus. Toutes deux attestent de sa présence. Et quand on s’adresse à l’une ou l’autre, chacune répond «~Jésus ».

En fréquentant Marie, on trouve la route de l’Eglise. Combien d’hommes et de femmes, de jeunes en particulier, ont redécouvert la foi, la prière, les sacrements, l’amour de l’Eglise, ici, à Lourdes, à Fatima, à Bagneux, à Beauraing… en fréquentant Marie. Les multiples ex voto qui décorent les murs en témoignent.

Nous vivons dans un contexte où l’image de l’Eglise est écornée, dégradée parfois à cause du scandale provoqué par les chrétiens, les prêtres. L’image est aussi souvent décriée parce que l’on projette largement sur l’Eglise son refus de Dieu, sa propre indifférence ou le règlement de compte avec sa propre vie.

Marie se veut une réponse maternelle, délicate à cette agressivité qui recèle en creux une attente de salut. Elle offre un visage de l’Eglise qui console et apaise. Elle offre le visage humain de l’Eglise.

Marie ne se trouve pas à l’avant-scène sous les feux de la rampe, mais elle est un humble témoin de l’Evangile qui se tient en retrait, qui se laisse traverser par la lumière et en désigne, en Dieu, la source. Elle ne retient rien pour elle-même de la grâce qui la touche, telle la lune qui réfracte la clarté solaire qui la frappe.

A Lourdes, comme ici même, la « belle dame », pour reprendre l’expression de Benoîte, apparaît dans toute sa splendeur. La beauté de Marie, c’est d’abord de son âme transparente à Dieu, une beauté qui irradie son corps immaculé. « De ses habits et de son visage, sortent tant de lumières, qu’on en a jamais pu exprimer les traits », disait de la Vierge, Benoîte Rencurel.

Les Anciens identifiaient la beauté à la splendeur de la Vérité. Si le Christ se définit comme la Vérité, Marie en est l’éclat, le jaillissement.
Dans une société qui se méfie du moralisme, du dogmatisme, Marie, «~la belle dame » nous invite à redécouvrir la beauté comme un chemin d’accès à Dieu. Elle nous en offre la saveur. Elle en suscite l’attrait. Elle nous convoque à une pastorale du goût et du désir.

En ce jour, frères et sœurs, demandons à la Vierge de nous conduire au Christ et à l’Eglise. Sa vocation est don. Elle est un don de Dieu pour nous. Elle est elle-même donnée à Dieu. Elle donne, en Jésus, Dieu aux hommes. Elle nous convie à faire de chacune de nos vies, un don, un présent, un service pour nos frères. Tel est le message de sainteté et de bonheur qu’elle nous invite à accueillir.

Amen »

+ Dominique Rey

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