Conversion pastorale des prêtres et des évêques

Texte de l’intervention de Mgr Dominique Rey lors du Synode sur la Nouvelle Evangélisation à Rome (intervention le 15 octobre 2012)


L’évangélisation a pour finalité la conversion des hommes, c’est-à-dire l’accueil de la nouveauté du Christ. Pour les pays d’ancienne chrétienté, il s’agit de passer d’un christianisme d’héritage et de quadrillage territorial à un christianisme d’adhésion personnelle à Jésus-Christ et d’engagement missionnaire.

Cette relance missionnaire concerne tous les baptisés et toutes les communautés ecclésiales, mais elle interpelle en premier lieu les prêtres et les évêques dans l’exercice de leur charge pastorale, notamment dans la mise en œuvre des tria munera[[La théologie catholique attribue trois fonctions de l’Église (tria munera) exercées en plénitude par la hiérarchie ecclésiastique :
– Fonction prophétique (Munus docendi) : magistère authentique exercé à travers l’apostolat.
– Fonction pastorale (Munus regendi) : le gouvernement papal et épiscopal guide les fidèles et leur offre l’Eucharistie.
– Fonction sacerdotale (Munus sanctificandi) : Les prêtres renouvellent la messe à travers le Christ et les fidèles sanctifient les choses terrestres.]], et en particulier du munus regendi. Dans un contexte socioculturel marqué par le sécularisme et le consumérisme, comment préparer les pasteurs et les futurs prêtres à exercer une gouvernance pastorale qui ne réduise pas la nouvelle évangélisation à un slogan ou à un catalogue d’actions à entreprendre ? De plus, l’élan missionnaire peut être asphyxié par l’immobilisme des pasteurs, l’individualisme, la bureaucratie, le cléricalisme… Un certain nombre de prêtres sont aussi gagnés par le scepticisme ambiant. Ils sont découragés, surchargés, ils ne voient pas arriver la relève. Ils sont confrontés à de nouvelles générations qui embrayent si peu avec le message pour lesquels ils ont donné leur vie. Ils se trouvent en décalage culturel avec elles. Ils ont été formés en régime de chrétienté, et les voilà affrontés au relativisme moral, à l’indifférence, à l’exculturation du christianisme.

Dans un tel contexte, comment aider les prêtres et les évêques à vivre une conversion pastorale ? Quels outils pédagogiques, quel contenu de formation proposons-nous ? Quels sont les lieux de relecture spirituelle et de soutien fraternel ? Quel type d’accompagnement mettons-nous en œuvre pour vivre et conduire ce changement pastoral ?

Je retiens quatre pistes de réflexion :

– 1. Premièrement, comme toute conversion, la conversion pastorale relève d’un effort de sanctification personnelle. C’est à l’intérieur d’une relation personnelle et vivante avec le Christ, que chaque pasteur doit refonder, re-choisir son ministère, réassumer, requalifier le mandat missionnaire qu’il a reçu du Christ et de l’Eglise. C’est par la prière personnelle, la lecture de la Parole de Dieu, c’est en adoptant une forme eucharistique de vie sacerdotale, c’est par l’accompagnement spirituel … que le pasteur donne une cohérence de vie à son identité ministérielle. Par ce chemin de sanctification personnelle, « l’être sacerdotal » du prêtre porte en lui-même le témoignage missionnaire et d’une vie saisie par le Christ, jusqu’au don radical de soit, jusqu’à la croix.

– 2. Deuxièmement, la conversion pastorale doit se nourrir d’une relecture approfondie du Magistère de l’Eglise, car la nouvelle évangélisation inscrit l’apostolat du prêtre à l’intérieur de l’Eglise. L’enseignement de l’Eglise offre à son ministère une intelligence théologique, un discernement, une sagesse et une vision pastorale qui permet d’appréhender l’évangélisation, non pas comme une action individuelle isolée, mais comme un processus d’intégration ecclésiale, processus permanent qui fait que chaque évangélisé est appelé à devenir, à son tour, un évangélisateur.

3. Troisièmement, la conversion des pasteurs réclame de la part de chaque prêtre (de chaque évêque) une nouvelle manière de porter la charge pastorale.

Je cite quelques priorités :
– Positionner le kérygme (c’est-à-dire la proclamation du salut par la prédication), à la pointe de la pastorale ordinaire ;
– Promouvoir une catéchèse d’initiation de type catéchuménal – car beaucoup de personnes « sacramentalisées » ne sont pas évangélisées.
– Favoriser une approche rationnelle et apologétique de la foi ;
– Revaloriser l’acte liturgique comme la pédagogie la plus complète de la foi, et dont l’Eucharistie est le sommet et la source ;
– Développer une ecclésiologie qui fasse droit à la coresponsabilité des fidèles laïcs, à l’intégration des divers charismes, à la constitution de communautés ecclésiales de base ;
– Offrir des espaces d’accueil, de dialogue, d’expression de la diaconie en direction des personnes seules et démunies ;
– Soutenir les familles, les écoles, l’engagement des chrétiens dans la société et la culture au service de « l’écologie de l’homme ».

Ces priorités pastorales nécessitent non seulement l’enthousiasme, la bonne volonté, la ferveur spirituelle, le zèle apostolique, mais aussi des qualifications et des compétences spécifiques qui mettent en cause les habitudes pastorales héritées du passé. Il faut aussi apprendre aux pasteurs à négocier le changement avec patience, avec courage, avec humilité, en se montrant affiliatif et en communiquant.

– 4. Quatrièmement, la conversion pastorale s’inscrit dans l’appel lancé par Jean-Paul II (dans Pastores dabo vobis) à adopter pour les prêtres « un nouveau style de vie pastorale » (n°18),
– Par exemple, à mettre en œuvre de nouvelles formes de vie fraternelle entre prêtres, de collaboration avec les laïcs ;
– Par exemple, à s’impliquer personnellement non seulement dans la conception, mais aussi dans la mise en œuvre des processus missionnaires.

En résumé, la conversion pastorale passe par la conversion de la gouvernance pastorale. Cette conversion requiert un effort significatif de formation.


+ Dominique Rey


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