Qu’est-ce que la filiation ?
La véritable question de la revendication au mariage pour les personnes de même sexe
Brève par Mélina Douchy-Oudot, Professeur à l’Université du Sud Toulon-Var
La filiation est la reconnaissance par le droit du lien de parenté existant entre un enfant et ceux qui lui ont donné la vie. La « parentalité » est un de ces concepts émergents où seule l’éducation de l’enfant est prise en compte, il s’agit du lien avec ceux qui vont aider l’enfant à grandir et qui correspond en droit, au mieux, à la délégation judiciaire de l’autorité parentale.
Ce lien juridique de parenté s’appuie, encore aujourd’hui, sur la réalité naturelle de l’engendrement.
Toutefois, les accidents de la vie ou les innovations médicales peuvent conduire à établir un lien de filiation au-delà de la procréation naturelle :
– soit parce qu’un enfant ayant été abandonné par ses parents, le droit lui substitue une nouvelle parenté en faisant abstraction des conditions d’engendrement,
– soit parce qu’un couple ayant des difficultés pour donner la vie demande à la science médicale de pallier cette stérilité par une solution, non pas thérapeutique, mais de substitution, il s’agit d’assistance médicale à la procréation. Dans ces deux dernières situations, ceux que le droit qualifie de parents ne le seront que par habilitation légale en quelque sorte. La preuve de la filiation connaîtra les méandres de ces situations, puisque la vérité biologique ne sera plus à même et plus la seule à expliquer le lien juridique établi ou à établir.
Ce faisant, le lien de filiation assure son rôle, donner un statut personnel et familial à toute personne, et sa finalité, intégrer l’individu au sein du corps social.
Les transformations actuelles connues par les familles conduisent parfois à des propositions doctrinales de réforme de la filiation pour le moins étonnantes qui pour ne concerner qu’une minorité de personnes – les couples de même sexe – aurait pour effet de s’imposer à la majorité des autres à laquelle elle serait imposée.
La question prochaine sera celle du lever du dernier tabou, l’inceste, comme en témoigne une demande de QPC, il est vrai non renvoyée au Conseil constitutionnel par la Cour de cassation (Cass. civ. 1re, 23 mai 2012, n° 12-40021).
Pourra-t-on détacher totalement le lien de l’enfant avec sa famille du lien de filiation entendu du lien de parenté ?
Les diverses lois ayant modifié les règles de dévolution du nom de famille, en 2002 et 2003, ont essayé, après avoir tué le père par la disparition du nom patronymique au profit du « nom de famille », elles ont donné tout pouvoir à la volonté par la déclaration conjointe des parents. On observe, cependant, que le lien de filiation est le seul référent lorsque l’enfant n’a qu’un lien de filiation établi, que le nom du père est choisi en cas de silence des parents, que le nom ne peut en aucun cas, ni même à titre de nom d’usage, être celui du parent qui n’a pas donné la vie à l’enfant (beau-père ou belle-mère dans les familles recomposées). Enfin, sociologiquement, la plupart des familles n’expriment aucun choix s’agissant du nom qui les désigne et les faits témoignent encore massivement de la transmission du nom patronymique…
Seule la transformation violente du droit de la filiation « par ceux qui gouvernent » imposera cette transformation non souhaitée par la société d’une filiation détachée de la génération, et d’une famille n’ayant plus de rapport avec les liens de parenté.
Publié le 04.12.2012.
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